Citoyen ? (2)
Publié le 2 Octobre 2006
« L’autre soir, ce gros nul de Nabil est venu m’aider à faire mon devoir d’éducation civique. Le sujet ressemblait à un titre de reportage d’« Envoyé spécial » : « l’abstention, pourquoi ? »
Avec Nabil le nul on en a discuté. Il pense par exemple qu’un mec de la cité du Paradis qui ne va plus à l’école depuis longtemps, qui n’arrive pas à trouver du boulot, dont les parents ne travaillent pas et qui partage sa chambre avec ses quatre petits frères, « qu’est-ce qu’il en a à foutre de voter ? ». Il a raison Nabil. Le type doit déjà se battre pour survivre au quotidien, alors son devoir de citoyen… Si la situation s’améliorait pour lui, il pourrait avoir envie de se bouger et de voter. En plus, je ne vois pas très bien par qui il pourrait se sentir représenté. Eh ben voilà, c’est à ce type là qu’il faut demander : « l’abstention, pourquoi ? ». Pas à une classe de boutonneux de quinze ans.
Je me dis que c’est peut-être pour ça que les cités sont laissées à l’abandon, parce qu’ici peu de gens votent. On est d’aucune utilité politique si on vote pas. Moi, à dix-huit ans, j’irai voter. Ici on n’a jamais la parole ; Alors quand on nous la donne, il faut la prendre […] »
Le droit de vote, comme l'évoque ici Faïza Guène dans Kiffe Kiffe demain, c'est ce qui se rapproche le plus à mon sens de la notion de citoyen : donner sa voix, auprès et pour la communauté ! Mais je ne suis pas entièrement d'accord avec les propos de l'héroïne du roman ; là, je m'apprête à faire une petite digression.
Il n'y a pas si longtemps (décembre dernier), des personnalités au rang desquelles Joey Starr, Djamel Debouze, Lady Lesty, Mathieu Kassovitz, Jean Pierre Bacri, ou encore Olivier Besancenot, appelaient les jeunes (les jeunes des cités plus particulièrement) à s'inscrire sur les listes électorales. Et voter. Bien ! Mais ce message, que j'ai reçu, assez brut comme un slogan, me dérange encore aujourd'hui. Et pour la simple raison, que si il est bien de voter, faut-il encore avoir la culture politique pour, les convictions, la réflexion nécessaire, qui va aider à discuter, à assumer, justifier (pour soi) le choix du bulletin que l'on va (ou pas) mettre dans l'urne… Bref on ne peut appeler à voter, sans par la suite, inciter les jeunes à se forger une vision politique et citoyenne (autant de l’acte que de la ville) ! Car cela ne vient pas comme ça. Ça s’apprend. Ça met du temps. Moi je commence tout juste…
Le risque après cela, étant de voir ramasser cette masse électorale, par celui qui saura le mieux jouer la carte de la flatterie ; promesses et démagogie à gogo. Or, si on commençait par dire, que l'on est libre de donner sa voix à qui l'on veut, de l'extrème droite a l'extrême gauche, et avec toutes les nuances entre, mais en connaissance de cause, alors on aurait peut-etre mieux fait.
Le clientélisme est un fait ! A Meaux, mais ça n'engage que moi, Beauval est aujourd'hui la réserve électorale sur laquelle la municipalité de Monsieur Copé peu se reposer (plus que la petite bourgeoisie plus nuancée à mon sens, et surtout moins nombreuse). Elle fait d’ailleurs beaucoup, souvent dans le m’as-tu vu et la poudre aux yeux plus que sur le fond, pour la conserver. Je ne parles pas ici au nom d’une quelconque opposition, je tiens à le rappeler. Je n’apprécie juste pas ce genre de comportement, où l’on est prêt pour le coup à écouter (d’une oreille très distraite) ceux que Faïza Guène décris comme ceux que l'on a pas envie ou besoin d'entendre. Le bureau des pleurs étant renommé pour la forme : comité de quartier.
Etre citoyen c’est être considéré, c’est certain, mais il faut voir comment, et par qui !
Enfin, si citoyen c’est avoir une conscience politique, une conscience de la ville (entité humaine) et de sa place dans la ville, peut-on d’ores et déjà imaginer que ce concept ne peut convenir à un jeune, un enfant, quand il est déjà dur pour un adulte d’y accéder ?