Une question d'image.
Publié le 7 Novembre 2008
A l'occasion de la sortie au cinéma du dyptique tiré de la vie de Jacques MESRINE (Mesrine: L'Instinct de mort et Mesrine : L'ennemi public n°1), je souhaitais poser la question de l'image de la ville de Meaux.
Mais quel est le rapport entre un film sur Mesrine et Meaux ? me demanderez-vous. Et bien le rapport entre Meaux et ces deux films c'est le réalisateur Jean François Richet. Ce dernier, originaire de la ville (je ne sais pas si il y est né, mais il y a grandi), a aussi tourné ses deux premiers films à Meaux.
Dans le premier, Etat des Lieux, qu'il tourne et produit avec l'acteur Patrick Dell'Isola, en 1995, il s'intéresse à la condition d'un ouvrier en banlieue. Film presque autobiographique, puisque Richet avant de devenir réalisateur s'est retrouvé à travailler en usine (à Meaux ?). Il vivait alors en HLM à Beauval avec sa mère. Richet est marqué dans son travail par le destin des petites gens, ceux qu'on entend pas, et la question du prolétaria. Largement influencé par les idées de Marx qui le mènent ici à tenir un discour engagé, ce premier film remarqué, tourné avec peu de moyen et tout en noir et blanc, lui permet de pousser les portes du cinéma français.
Son second projet, toujours politique, est aussi pas loin de faire polémique. Dans Ma 6-T va crack-er qu'il tourne à Meaux entre 1995 et 1997 (tournage long et difficile des dires du réalisateur lui même), Richet "retourne" en banlieue, et décrit une tagédie autour des phénomènes de bandes et des bavures policières. Le synopsys (source : Allocine) : "Au cours d'une soirée hip-hop, très attendue par les jeunes d'un quartier, une fusillade éclate. La police intervient, un policier tire. Un mort. Les jeunes du quartier, désorientés, se révoltent..."
Le film est dur. Violent. Et personne n'en sort indemne. Ni les jeunes, ni les policiers, qui se heurtent ici dans une vision assez manichéenne : les bon c'est les gosses, les méchants les keufs. Mais aucun personnage n'attire la sympathie. Personnellement je n'ai pas aimé la violence de ce film. Et la morale de l'histoire (si il y en a une) m'est passée à côté. J'en retiens quand même cette violence, qui dans d'autres lieux (ici c'est une histoire racontée au cinéma), à fait beaucoup pour entretenir la peur dans certains quartiers et nourrir l'idéologie du tout sécuritaire. Une idéologie qui marque aussi Meaux aujourd'hui. De là à parler de cause à effet, comme si ce film était la cause de la politique sécuritaire menée à Meaux : Non. Ou peut-être que si. Un peu quand même. Dans la mesure ou l'image qui se dégage de ce film s'ajoute à toutes les images de la banlieue - terrain de jeu des bandes arrmées jusqu'aux dents, western version béton, avec des armes à feu, des braquages... - relayée d'un côté par certains jeunes qui vivent dans cette presque idéologie (à coup de "77 en force", "Nik les keufs"...), et de l'autre côté par un journalisme-documentaire qui se complet aussi dans cette image. La Peur. Or cette image, même si elle a un tout petit peu de vérité, n'est pas ce que vive la très grande partie des gens qui vivent en banlieue et dans les quartier. Et elle n'est pas l'image de Meaux. Et pourtant les politiques locaux (Jean François Copé en premier), s'en sont servi pour "justifier" une politique (sécuritaire) et attirer des subventions, et ça en dépit d'une stigmatisation d'une partie de la population (presque 25 000 personnes quand même, et peut-etre bien Meaux dans sa totalité). Beauval pendant longtemps (peut-etre moins maintenant), ça a été "territoire interdit", à cause de la mauvaise image du quartier.
On est en 1997 quand sort Ma 6-t va crack-er. Déjà à l'époque on annule une projection publique du film, qui devait se tenir au Majestic, par peur de la réaction des spectateurs (la casse). A tort ou à raison ? Ce film n'a pourtant pas, par la suite, un grand écho et fait une carrière plutôt discrète, au grand, puis et au petit écran.
Il revient dans l'actualité en 2005, avec les émeutes en banlieue, où la "fiction" de Ma 6-T va crack-er rejoint de façon troublante la réalité. Au point qu'on a donné à ce film un discours quasi prohétique, et en même temps l'idée qu'il véhiculait un message dangereux. Ce n'est pas la réalité. Richet dans ce film ne fait que ressortir avant tout une colère, un désespoir, qui sont aussi ceux qui se sont exprimé dans le RAP et le mouvement HIP HOP à la même époque, dans les clips vidéo, dans des films comme La Haine de Matthieu Kassovitz (film auquel on a pas mal comparé Ma 6-T va crack-er).
Il ne faut pas non plus oublier la part de subjectivité qui traverse la filmographie de Richet (comme on pourrait dire du mouvement RAP). Dans Ma 6-T va crack-er, Assault sur le central 13 (remake du film de Carpenter tourné aux Etats Unis) et Mesrine, il y a aussi un goût pour le film d'action où ça canarde dur, une culture des héros mafioso, des gangsters, des rippous, que ça saigne avec un peu de classe quand même et sans trop passer par la case prison. La culture du gangster, c'est aussi une partie de l'image et de la culture RAP. On aime ou pas. On y croit ou pas. Mais ça tient une part forte dans l'imaginaire de la ville qui en découle, et ce n'est qu'une image !
Alors je termine en revenant sur l'image de la ville. A Meaux, on a (on a eu), l'image de la banlieue violente. A l'opposé on a l'image consensuelle et le message lénifiant de la municipalité, qui se veut rassurante et positive, au point d'en dégouliner de niaiserie parfois (autant qu'une publicité pour de la lessive ou pour du shampoing). Entre il n'y a rien. Enfin si il y a ce blog. Il y a aussi les blogs d'autres habitants. Mais l'idée est là, que l'on peut véhiculer une image qui ne se trouve pas dans les deux extrèmes pré-cités et qui dominent (malgré tout). Je ne prétend pas à travers MEAUX (le blog) détenir la vérité de ce qu'est la ville, ou donner la vraie image de la ville. Même si j'essaie de m'en rapprocher, j'en suis loin. La vérité elle est dans la somme des images qu'on va pouvoir trouver d'une ville. Dans la somme des subjectivités et des regards qui vont pouvoir s'exprimer à son sujet. Des images de la ville il y en a autant que de personnes qui vivent la ville. Pour certains ce sera l'ennuie, d'autre le travail, et d'autres encore la haine, l'amour, la nostalgie, la fiction, l'avenir... et vous quelle est l'image que vous renvoie la ville ?
PS : vous êtes d'accord ou pas avec le contenu de cet article. Vous contestez certaines choses, dites le !
Mais quel est le rapport entre un film sur Mesrine et Meaux ? me demanderez-vous. Et bien le rapport entre Meaux et ces deux films c'est le réalisateur Jean François Richet. Ce dernier, originaire de la ville (je ne sais pas si il y est né, mais il y a grandi), a aussi tourné ses deux premiers films à Meaux.
Dans le premier, Etat des Lieux, qu'il tourne et produit avec l'acteur Patrick Dell'Isola, en 1995, il s'intéresse à la condition d'un ouvrier en banlieue. Film presque autobiographique, puisque Richet avant de devenir réalisateur s'est retrouvé à travailler en usine (à Meaux ?). Il vivait alors en HLM à Beauval avec sa mère. Richet est marqué dans son travail par le destin des petites gens, ceux qu'on entend pas, et la question du prolétaria. Largement influencé par les idées de Marx qui le mènent ici à tenir un discour engagé, ce premier film remarqué, tourné avec peu de moyen et tout en noir et blanc, lui permet de pousser les portes du cinéma français.
Son second projet, toujours politique, est aussi pas loin de faire polémique. Dans Ma 6-T va crack-er qu'il tourne à Meaux entre 1995 et 1997 (tournage long et difficile des dires du réalisateur lui même), Richet "retourne" en banlieue, et décrit une tagédie autour des phénomènes de bandes et des bavures policières. Le synopsys (source : Allocine) : "Au cours d'une soirée hip-hop, très attendue par les jeunes d'un quartier, une fusillade éclate. La police intervient, un policier tire. Un mort. Les jeunes du quartier, désorientés, se révoltent..."
Le film est dur. Violent. Et personne n'en sort indemne. Ni les jeunes, ni les policiers, qui se heurtent ici dans une vision assez manichéenne : les bon c'est les gosses, les méchants les keufs. Mais aucun personnage n'attire la sympathie. Personnellement je n'ai pas aimé la violence de ce film. Et la morale de l'histoire (si il y en a une) m'est passée à côté. J'en retiens quand même cette violence, qui dans d'autres lieux (ici c'est une histoire racontée au cinéma), à fait beaucoup pour entretenir la peur dans certains quartiers et nourrir l'idéologie du tout sécuritaire. Une idéologie qui marque aussi Meaux aujourd'hui. De là à parler de cause à effet, comme si ce film était la cause de la politique sécuritaire menée à Meaux : Non. Ou peut-être que si. Un peu quand même. Dans la mesure ou l'image qui se dégage de ce film s'ajoute à toutes les images de la banlieue - terrain de jeu des bandes arrmées jusqu'aux dents, western version béton, avec des armes à feu, des braquages... - relayée d'un côté par certains jeunes qui vivent dans cette presque idéologie (à coup de "77 en force", "Nik les keufs"...), et de l'autre côté par un journalisme-documentaire qui se complet aussi dans cette image. La Peur. Or cette image, même si elle a un tout petit peu de vérité, n'est pas ce que vive la très grande partie des gens qui vivent en banlieue et dans les quartier. Et elle n'est pas l'image de Meaux. Et pourtant les politiques locaux (Jean François Copé en premier), s'en sont servi pour "justifier" une politique (sécuritaire) et attirer des subventions, et ça en dépit d'une stigmatisation d'une partie de la population (presque 25 000 personnes quand même, et peut-etre bien Meaux dans sa totalité). Beauval pendant longtemps (peut-etre moins maintenant), ça a été "territoire interdit", à cause de la mauvaise image du quartier.
On est en 1997 quand sort Ma 6-t va crack-er. Déjà à l'époque on annule une projection publique du film, qui devait se tenir au Majestic, par peur de la réaction des spectateurs (la casse). A tort ou à raison ? Ce film n'a pourtant pas, par la suite, un grand écho et fait une carrière plutôt discrète, au grand, puis et au petit écran.
Il revient dans l'actualité en 2005, avec les émeutes en banlieue, où la "fiction" de Ma 6-T va crack-er rejoint de façon troublante la réalité. Au point qu'on a donné à ce film un discours quasi prohétique, et en même temps l'idée qu'il véhiculait un message dangereux. Ce n'est pas la réalité. Richet dans ce film ne fait que ressortir avant tout une colère, un désespoir, qui sont aussi ceux qui se sont exprimé dans le RAP et le mouvement HIP HOP à la même époque, dans les clips vidéo, dans des films comme La Haine de Matthieu Kassovitz (film auquel on a pas mal comparé Ma 6-T va crack-er).
Il ne faut pas non plus oublier la part de subjectivité qui traverse la filmographie de Richet (comme on pourrait dire du mouvement RAP). Dans Ma 6-T va crack-er, Assault sur le central 13 (remake du film de Carpenter tourné aux Etats Unis) et Mesrine, il y a aussi un goût pour le film d'action où ça canarde dur, une culture des héros mafioso, des gangsters, des rippous, que ça saigne avec un peu de classe quand même et sans trop passer par la case prison. La culture du gangster, c'est aussi une partie de l'image et de la culture RAP. On aime ou pas. On y croit ou pas. Mais ça tient une part forte dans l'imaginaire de la ville qui en découle, et ce n'est qu'une image !
Alors je termine en revenant sur l'image de la ville. A Meaux, on a (on a eu), l'image de la banlieue violente. A l'opposé on a l'image consensuelle et le message lénifiant de la municipalité, qui se veut rassurante et positive, au point d'en dégouliner de niaiserie parfois (autant qu'une publicité pour de la lessive ou pour du shampoing). Entre il n'y a rien. Enfin si il y a ce blog. Il y a aussi les blogs d'autres habitants. Mais l'idée est là, que l'on peut véhiculer une image qui ne se trouve pas dans les deux extrèmes pré-cités et qui dominent (malgré tout). Je ne prétend pas à travers MEAUX (le blog) détenir la vérité de ce qu'est la ville, ou donner la vraie image de la ville. Même si j'essaie de m'en rapprocher, j'en suis loin. La vérité elle est dans la somme des images qu'on va pouvoir trouver d'une ville. Dans la somme des subjectivités et des regards qui vont pouvoir s'exprimer à son sujet. Des images de la ville il y en a autant que de personnes qui vivent la ville. Pour certains ce sera l'ennuie, d'autre le travail, et d'autres encore la haine, l'amour, la nostalgie, la fiction, l'avenir... et vous quelle est l'image que vous renvoie la ville ?
PS : vous êtes d'accord ou pas avec le contenu de cet article. Vous contestez certaines choses, dites le !