Un projet hôtelier à la place de l'ancienne école Cornillon ?
Publié le 8 Août 2007
Je suis tombé un peu par hasard, c'est à dire vraiment sans chercher, sur le plan d'aménagement de la ZAC du quartier Luxembourg, tel qu'il apparaît validé par la municipalité de Jean Lyon en 1990.
Et j'ai été assez surpris de voir à quel point le quartier Luxembourg, près de 20 ans après le début de sa mise en chantier, semble fidèle aux plans originels. Semble seulement parce que quelques modifications ont été apportées depuis, sur lesquelles je vous propose de revenir, et d'autres choses...
Retour sur le projet de la ZAC Luxembourg.
Le document qui suit est une photo que j'ai fait d'un plan publié dans le Dictionnaire Topographique et Historique des Rues de Meaux - Tome 2 : le quartier du Marché (Un ouvrage remarquable sur la ville de Meaux, produit par la Société Littéraire et Historique de la Brie) - et représentant le plan programmatique des îlots de la ZAC Luxembourg, tel qu'entériné lors du conseil municipal du 4 octobre 1990. Je vous en propose une version colorisée par mes soins, pour une meilleure lecture [cliquez sur la carte pour la voir en plus grand].
Je reprends ici le texte de la SLHB, au sujet du projet du quartier Luxembourg. Pour information l'ouvrage fut publié en 1992.
" Le Conseil municipal, dans sa séance du 4 octobre 1990, a décidé de créer la ZAC Luxembourg et de confier l'équipement et l'aménagement de la zone, selon les stipulation d'une convention, à l'Agence Foncière et Technique de la Région Parisienne (AFTRP, note du webmaster).
Il s'agit de substituer à l'enclave de l'ancienne caserne un quartier d'habitation qui prolonge le tissu rénové du Marché et du centre ancien.
Les objectifs poursuivis par la municipalité sont les suivants :
- répondre à la demande d'habitat sur le centre ville par une offre de logements diversifiés, dans un quartier bien relié aux autres quartiers et bien équipé ;
- à l'occasion de l'opportunité foncière que représentait la libération de l'emprise de la caserne, réaliser des équipements publics rayonnants sur le quartier et l'ensemble de l'agglomération ;
- assurer la cohérence de l'aménagement de la ZAC Luxembourg avec le quartier du Marché et ses différentes infrastructures notamment ;
- valoriser les berges de la Marne, les ouvrir au public dans une démarche de reconquête des berges du fleuve, tout en essayant de s'affranchir dans toute la mesure du possible des servitudes liées aux inondations de la Marne. " **
Si on retrouve dans le quartier d'aujourd'hui la forme des îlots du plan originel, l'ambition de mixité des fonctions sur le nouveau quartier (pensé comme une extension du Marché) fut largement remise en cause. Etaient prévus : des écoles primaires et maternelles, des bâtiments dédiés à l'enseignement supérieur, une médiathèque, des bureaux, un hôtel, un parking en silo, des commerces et activités de services, l'aménagement d'espaces publics, et enfin des bâtiments de logements collectifs. Par la suite, l'hôtel (îlot en vert sur le plan), prévu à la place de l'école Cornillon, de même que les bureaux et une partie des bâtiments d'enseignement supérieur, en alignement sur la rue Cornillon passeront à la trappe, de même qu'une grande partie des activités de services et commerces (en rez-de-chaussée), au profit de bâtiments exclusivement dédiés à l'habitat. C'est à mon sens ce qui fait de la ZAC aujourd'hui un demi échec. Pourquoi est-ce que le programme n'a pas marché, je ne l'explique pas trop, mais il est certain que le quartier et notamment sa liaison avec le Marché et avec la gare (par le pont Jean Bureau et la future passerelle), aurait du l'inscrire dans une pratique de ville de type centre-ville ! Aujourd'hui le quartier Luxembourg est bizarrement enclavé, caché derrière la médiathèque, et ne donne pas forcément envie de s'y promener. Je remets donc en cause sa "qualité" de quartier résidentiel qui au final n'a pas changé l'image du quartier de garnison qui l'a précédé (affiché comme le principal objectif de la ZAC).
Quelques petites choses à retenir sur le projet de la ZAC et le quartier Luxembourg.
Concernant l'habitat, la municipalité socialiste de Jean Lyon ambitionnait une mixité d'offre de logements, aussi diversifiée que possible sur le quartier, et conformément au Plan Local d'Habitat qui prévoyait 60% de logements libres (30% PC, 30% accession libre) et 40% en logements aidés (ou logement social, dont 10% PLA (prêt locatif aidé), 10% PLI (prêt locatif intermédiaire), 10% PAP (prêt d'accession à la propriété), et 10% PCL (prêt conventionné locatif) ). Je ne suis pas sur que ces prescriptions soient restées les mêmes sur le quartiers, et j'aurai bien voulu savoir comment a évolué la question du logement qui, je le souligne encore, a eu la priorité absolue sur le programme de la ZAC, et fut probablement un mauvais choix dans la suite de l'aménagement du quartier. C'est mon avis...
Pas de projet d'hôtel donc à l'emplacement du bâtiment de l'ancienne école Cornillon. Dommage ? A la limite peu importe. Je ne saurais pas expliquer pourquoi de toute façon ce genre de projets (les bureaux de la même façon) rencontre autant de difficulté à se monter (j'hésite à rajouter : "à Meaux" ?). Peut-être par manque de partenaire privé... Je le note surtout parce que cette "découverte" recoupait deux information auxquelles je dédiais une note récemment sur ce blog : la destruction du bâtiment de l'école Cornillon et la question légitime de savoir ce qui allait se faire à la place, et la réflexion sur "Meaux ville dortoir" et la proposition que j'avais faite de ramener l'hôtellerie en centre ville. Une réponse quand même qu'aura pu m'apporter la SLHB et son article sur la ZAC Luxembourg, c'est ce que le nom de l'AFTRP venait faire sur le permis de démolir affiché devant l'école à coté du bénéficiaire (il s'agit de l'aménageur).
La médiathèque est vraiment la grande réussite de ce projet urbain. Pour son programme et pour son architecture de grande qualité. Une petite digression, mais il est amusant de rappeler comme la médiathèque fut décriée par l'opposition de Jean Lyon, et après même menacée de "fermeture" par Jean François Copé qui lui succéda à la mairie (en 1995), avant que celui-ci ne se réapproprie la médiathèque (jusqu'à en paraître être à l'origine dans l'esprit de beaucoup de gens !). Il est autant amusant de voir que le projet de la ZAC est aussi l'initiative d'une municipalité et que c'est une autre municipalité qui en a suivit le projet. On peut considérer que les deux s'en partagent donc autant les mérites que les échecs, non ?
La "reconquête des berges du fleuve" ? Tiens donc ce n'est donc pas non plus une nouveauté ? Ce n'est pas l'œuvre de notre bon maire ? Ah, j'aurai cru pourtant O-o Même la passerelle ? Bah oui même la passerelle... dingue ! Et oui une passerelle entre la gare et le nouveau quartier était prévue sur le plan d'aménagement de 1990 ; elle figure près de la parcelle "I" en bas du plan, en symétrique de la passerelle du Richemont par rapport au pont Jean Bureau.
Plus généralement, l'aménagement de l'espace public à lui aussi souffert entre les plans originaux et le résultat actuel. La place de Valmy, nommée place haute dans la première proposition, était destinée à être plantée tandis que la place basse (place de Fleurus) aurait pu accueillir un parking en sous-sol. Le mail projeté (dit du Royal Piémont), n'aura quant à lui toujours pas été réalisé. Ces espaces, associés aux activités de service sont pour beaucoup dans la pratique du quartier. De toute évidence ils ne jouent pas le rôle moteur attendu de dynamique et d'attrait pour le quartier.
Le pôle d'enseignement supérieur est moitié moindre que prévu dans les plans. Seul le bâtiment de l'IUT aura été construit. Côté écoles primaires, On a vu récemment l'ouverture du groupe scolaire Luxembourg rassemblant l'école du Marché, l'école Cornillon et l'école Dolto, sur la parcelle de l'école Dolto. La destruction des écoles n'était pas vraiment prévu, mais il était bien question dés le départ de conforter ce pôle, complété par la création d'une nouvelle école sur la parcelle "I" en bord de Marne. "I" sera devenue résidentielle.
Un parking en silo de 240 place était projeté. Certainement dans l'esprit du parking du MATCH, c'est à dire en étage. Il sera remplacé par le projet de parking souterrain sous le bâtiment de l'école Luxembourg. Pour moi une mauvaise association.
Enfin, les chiffres de la construction ont également du bouger. 88 500 m² de logements collectifs étaient envisagés, soit la possibilité de 850 logements collectifs. Etant donné d'une part qu'une grande partie des parcelles dédiées aux services, à l'enseignement, etc., ainsi que les RDC des îlots mixtes ont été redonnés aux logements, mais que d'autre part les parcelles A, B et C (de l'autre côté de la rue Cornillon) n'ont pas été mise à disposition, et que de même encore quelques îlots restent en attente, dans quelle mesure ces chiffres ont été revus (à la hausse) ?
Cela dit les choses pourraient bouger bientôt sur les îlots A, B et C, vu qu'une partie des bâtiments de ce côté de la rue a été libéré (je pense notamment au garage Midas qui a déménagé ...).
Pour terminer, je rappellerais quelques petites ou grandes idées sur le projet, dont certaines évoquées plus haut. D'abord je considère comme un demi échec l'absence d'une plus grande mixité entre les programmes et les fonctions sur le quartier. La forte résidentialisation du quartier en étant la raison directe. Trop forte résidentialisation même, qui a eu une influence jusque sur la forme du quartier et responsable de certains "défauts" qui participent aussi de le rendre peu attractif : la rapport entre hauteur des bâtiments et largeur des rues, un peu glauque, chicanes pour parvenir au coeur du quartier, typologie de bâtiment peut-être pas des plus joyeuse qui multiplie les vis à vis, l'ombre dans les rues, etc. Des défauts qui auraient pu passer avec une autre volonté sur l'architecture du lieu. Et vraiment juste avec une question d'architecture. Possiblement qu'une typologie d'"îlot ouvert", invention de Christian de Portzamparc (comme pour Bercy, ou Massena Rive Gauche, à Paris), aurait bien convenu à ce quartier. Aurait surtout bien convenu au dessin du plan de la ZAC (dont je ne suis pas ultra fan non plus). Elle aurait permis de casser un peu les alignements, permis aussi les percées sur les intérieurs d'îlots, permis d'ouvrir des vues, et la possibilité de jouer du gabarit des bâtiments plus librement, en pouvant mettre des petites tours de 10 étages, des bâtiments plus larges, ou des objets plus petits comme des maisons de ville. Et des objets architecturaux sur lesquels il est peut-être plus facile d'agir si besoin est, que sur les grands bâtiments simulant la diversité, que construisent les promoteurs actuellement (et dont Meaux regorge d'exemples). A titre d'exemple l'opération des Terrasses (?) en bord de Marne, ex projet Invetimmo, assez monstrueuse en taille !
Je crois me souvenir d'une maquette de la ZAC dans le hall de la médiathèque. Mais je me trompe peut-être. Sinon je m'étonne qu'on semble avoir cessé une sorte de suivi sur la ZAC. Pas dans sa construction... quoi que... mais dans sa communication. L'impression qu'on a cédé aux projets immobiliers qui se font indépendamment et chacun de son côté, au détriment du regard global sur le projet de la ZAC Luxembourg. Si certaines personnes sont plus informés sur la façon dont a évolué et continu de se transformer le quartier, qu'ils n'hésitent à venir parler. ;-)
** p81, Dictionnaire Topographique et Historique des Rues de Meaux, tome 2 : Le quartier du Marché, auteur : Société Littéraire et Historique de la Brie.